Appels à contribution pour des dossiers thématiques
Appel volume 3, numéro 2 – 2026 : « Savoirs endogènes, territoires et durabilité »
Numéro coordonné
Par Gabriel Cyrille Nguijoi
Argumentaire
Dans un contexte mondial caractérisé par la convergence de crises écologiques, sociales, sécuritaires et épistémiques, les territoires africains se trouvent confrontés à des choix déterminants quant à leurs trajectoires de développement et leurs modes de gouvernance. La valorisation et la réappropriation de ces savoirs endogènes s’imposent donc comme une réponse stratégique à ces défis, en offrant des alternatives ancrées dans les réalités locales et porteuses d’innovations adaptées.
Ce numéro ambitionne globalement d’ouvrir un débat scientifique interdisciplinaire et comparatif sur les articulations complexes entre savoirs locaux, dynamiques territoriales et durabilité, en particulier dans les sociétés africaines. Il s’agit de dépasser les approches normatives et extractives pour inscrire la réflexion dans une démarche de décolonisation cognitive, d’endogénéisation des pratiques et d’innovation méthodologique, afin d’examiner comment ces savoirs locaux contribuent à la résilience, à la sécurité, au développement durable et à la souveraineté territoriale.
La réflexion s’inscrit dans la nécessité de revisiter les modes de production et de validation des savoirs, en mettant en lumière les tensions épistémologiques entre savoirs exogènes et savoirs locaux, dans une dynamique dialectique de décolonisation et/ou de réappropriation cognitive (Santos 2014). Elle dialogue avec les travaux de Valentin-Yves Mudimbe sur les conditions de possibilité d’un savoir africain autonome (Mudimbe, 1988) et avec les analyses d’Achille Mbembe sur les formes de subjectivité et de territorialité dans les contexte postcoloniaux (Mbembe, 2000, 2016).
Un intérêt particulier sera accordé aux innovations méthodologiques et épistémiques issues des pratiques de terrain : enquêtes participatives, démarches inclusives et co-construction des savoirs. Ces approches, bien qu’innovantes, doivent également être interrogées quant à leurs limites, afin d’éviter les dérives de folklorisation ou d’instrumentalisation des savoirs endogènes.
Ce numéro a pour ambition de fournir une analyse rigoureuse et critique des interactions entre savoirs endogènes, durabilité et territoires à travers quatre axes principaux.
Principaux axes thématiques
- Épistémologies endogènes et reconfiguration des savoirs
L’épistémologie endogènes repose sur la reconnaissance des systèmes de connaissances propres aux sociétés africaines, longtemps marginalisés par les paradigmes et discours occidentaux dominants. Loin d’être figés ou archaïques, ces savoirs sont dynamiques, hybrides et souvent articulés à des dispositifs modernes, produisant ainsi des formes de connaissance composites adaptées aux réalités locales. Cet axe analysera les processus de production, transmission et transformation de ces savoirs, ainsi que leur potentiel pour réorienter la recherche scientifique, les politiques de développement et les innovations technologiques.
- Territoires, pratiques locales et résilience socio-écologique
Les territoires africains constituent des laboratoires vivants de pratiques locales qui soutiennent la résilience socio-écologique. Celle-ci se traduit par la capacité des communautés à préserver leurs moyens d’existence malgré les aléas climatiques, les pressions foncières et les mutations socio-économiques rapides. Cet axe examinera comment les savoirs locaux structurent des pratiques telles que l’agroforesterie, la gestion communautaire des ressources hydriques ou les techniques traditionnelles de conservation des sols. Il interrogera également les dispositifs de gouvernance locale – participation collective, normes coutumières, arrangements fonciers – qui conditionnent l’accès et la régulation des ressources.
- Politiques publiques, innovation locale et durabilité
L’intégration des savoirs endogènes dans les politiques publiques constitue un enjeu stratégique pour la durabilité en Afrique. L’analyse critique des dispositifs existants révèle un décalage fréquent entre les intentions affichées et les pratiques effectives, en raison de tensions entre régulations étatiques et modes de gestion coutumiers, ou de la difficulté à valoriser les savoirs locaux dans des systèmes bureaucratiques uniformisés. Cet axe s’attachera à examiner les conditions de l’appropriation territoriale des politiques, en mettant en lumière des expériences innovantes telles que la planification participative, les partenariats multi-acteurs et le financement de technologies agroécologiques adaptées aux contextes locaux.
- Savoirs locaux, sécurité multidimensionnelle et autonomie territoriale
Le territoire ne se réduit pas qu’à une matérialité géographique. Il est aussi, au sens de Mbeng Dang et Ligue Engamba (2023), un espace social, culturel et symbolique où s’inscrivent les savoirs locaux. Ainsi, il est donc pour Zoyem et Mbih, (2021), essentiel pour analyser les stratégies locales de résilience et de gestion des tensions, notamment dans les zones fragilisées par des conflits. Cet axe abordera la notion élargie de sécurité (alimentaire, environnementale, foncière, sanitaire, numérique) et les systèmes communautaires d’alerte précoces fondés sur des observations empiriques. Ces dynamiques ouvrent la voie à une réflexion sur l’autonomie territoriale et la pérennité des dispositifs endogènes de sécurisation.
VARIA
Afin de préserver l’ouverture scientifique et la diversité des approches, le numéro accueillera également des contributions dans une section varia, pour des propositions qui, tout en s’inscrivant dans l’esprit général, ne relèvent pas directement des axes thématiques définis. Les articles proposés pourront donc :
- Explorer des thématiques transversales ou émergentes liées aux savoirs locaux, à la durabilité ou aux dynamiques territoriales ;
- Présenter des études de cas originales, des analyses critiques ou des innovations méthodologiques enrichissant le débat ;
- Traiter de questions connexes telles que les migrations, les langues et pratiques culturelles, les spiritualités africaines, les expressions artistiques ou les formes de résistance culturelle, dès lors qu’elles éclairent les enjeux de durabilité et de territorialité ;
- Proposer des analyses en science politique ou relations internationales, par exemple sur la souveraineté cognitive, les politiques de reconnaissance des savoirs ou la coopération régionale autour des savoirs endogènes.
Cette section vise à favoriser l’inclusivité scientifique et la pluralité des voix, tout en stimulant l’innovation intellectuelle. Les propositions feront l’objet d’une évaluation rigoureuse et pourront être regroupées dans une partie spécifique afin de renforcer la cohérence et la richesse du volume.
Conditions de soumission
La soumission des propositions obéit à la politique générale des Revues du Grenier des Savoirs. Dans un premier temps, il convient d’envoyer un résumé pour le faire valider, en utilisant le formulaire officiel de soumission d’un résumé (suivre le lien : https://www.revues.scienceafrique.org/formulaire/).
L’évaluation est faite par les pair-e-s (peer-review). La politique antiplagiat est arrimée à celle du Grenier des savoirs.
Il doit présenter de façon claire et concise le thème de votre projet de texte, son approche théorique, sa méthodologie, ainsi que son lien avec l’appel à contribution, le cas échéant.
Il est recommandé de répéter les concepts clés dans le résumé pour faciliter leur repérage par les moteurs de recherche. Chaque dépôt de résumé doit comporter les métadonnées suivantes :
- Un titre et, s’il y a lieu, un sous-titre.
- Un résumé de 200 à 250 mots, en français ou en anglais.
- 5 à 6 références bibliographiques.
- 5 à 6 mots clés, descriptifs mais généraux : ceux que vous utiliseriez pour chercher un article tel que le vôtre.
- Le(s) prénom(s), nom(s) et l’affiliation officielle de tous les auteurs et autrices, avec leur adresse mail.
Si le texte de votre article est déjà rédigé, vous devez quand même soumettre seulement le résumé et attendre la décision du comité de rédaction. En effet, les recommandations à propos de votre résumé pourraient vous servir à bonifier votre texte.
Les résumés ainsi que les textes définitifs seront exclusivement soumis en ligne à l’adresse suivante : https://www.revues.scienceafrique.org/formulaire/
Les revues du Grenier des savoirs recommandent une longueur de 15 pages pour un article ou une synthèse, bibliographie comprise. Pour l’ensemble des consignes inhérentes au formatage du texte et aux références bibliographiques, se rapporter au lien suivant : https://www.revues.scienceafrique.org/instruction/.
La revue publie des textes en anglais et en français. Une traduction du résumé en langue africaine est fortement recommandée.
Avant l’envoi des textes définitifs, les auteurs et autrices sont prié-e-s de télécharger la feuille de style et de respecter scrupuleusement les normes de présentation qu’ils ou elles trouveront à cette adresse :
Chronogramme
Date de lancement de l’appel : 06 décembre 2025
Date limite de réception des résumés (en ligne uniquement) : 30 mars 2026
Réponses aux auteurs et autrices après évaluation de la proposition : 30 avril 2026
Réception des textes complets : 15 juillet 2026
Date de publication du volume : décembre 2026
Comité de rédaction
- NZINO MUNONGO Victorine Ghislaine, Éditrice en chef, Ministère de la Recherche Scientifique et de l’Innovation (Cameroun);
- CHIMANYE MOTIO Aristide, Co-éditeur en chef, Université de Yaoundé II (Cameroun);
- NGUIDJOI Gabriel Cyrille, Ministère de la Recherche Scientifique et de l’Innovation (Cameroun);
- EMAH NGONO Line Murielle, Université Catholique d’Afrique Centrale (Cameroun);
- NGA NGONO, Université de Yaoundé II (Cameroun);
- KABAYENE Marcelle, Université Catholique d’Afrique Centrale (Cameroun);
- NGA OLOA Linda Paule Carelle, Université de Dschang (Cameroun);
- FOTSING Serges Roméo, Université de Ngaoundéré (Cameroun);
- BIENDA Gilbert, Centre d’Etudes et de Recherche en Droit International (Cameroun).
Comité scientifique
- Agnès Makougoum, Université de Yaoundé II (Cameroun)
- Akono Ongba Sedena, Université de Bertoua (Cameroun)
- Alladin Judicael, Université de Montréal (Canada)
- Amougui Galaoua Pulchérie, Université Catholique d’Afrique Centrale (Cameroun)
- Anuoluwapo Jolaoso, University of Lagos (Nigeria)
- Christelle Belporo, Université de Montréal (Canada)
- Claude Alvine Zobo, Institut des Relations Internationales du Cameroun (Cameroun)
- Eddy Bruno Essien, Charles University (Czech Republic)
- Estelle Gassi Matago, Université de Yaoundé II (Cameroun)
- Hassan Njifon Njoya, Université de Buea (Cameroun)
- Ingrid Mulamba, Université de Kinshasa (République Démocratique du Congo)
- Jean Didier Boukongou, Université Catholique d’Afrique Centrale (Cameroun)
- Jean Louis Ebene, Université Catholique d’Afrique Centrale (Cameroun)
- Jilefack Amin Ngami, McGill University (Canada)
- Josiane Tousse Djou, Université de Yaoundé II (Cameroun)
- Mark Mc Quinn, University of London (United Kingdom)
- Mehari Fisseha, University of Granada (Spain)
- Nadine Machikou Ngameni, Université de Dschang (Cameroun)
- Ornella Nguessele ; Université Catholique d’Afrique Centrale (Cameroun)
- Parfait Oumba, Université Catholique d’Afrique Centrale (Cameroun)
- Patrice Bigombe Logo, GRAPS/Université de Yaoundé II, Centre de Recherche et d’Action pour le Développement Durable en Afrique centrale (Cameroun)
- Paul Animbom, Université de Bamenda (Cameroun)
- Pierre Étienne Kenfack, Université Catholique d’Afrique Centrale (Cameroun)
- Tamassang Christopher Funwe, Université de Yaoundé II (Cameroun)
- Tony Karbo, University of Peace-Africa (Ethiopia)
Références représentatives
Hoyte, S. (2025). « Les Baka, un modelé ancestral pour préserver les forêts du Cameroun », The Conversation. https://theconversation.com/les-baka-un-modele-ancestral-pour-preserver-les-forets-du-cameroun-252956
Mbembe, A. (2000) De la postcolonie. Essai sur l’imagination politique dans l’Afrique contemporaine, Paris : Karthala, 293p.
Mbeng D. & Engamba, L. (2023). « Coopération culturelle et tourisme à l’aune de « la Ceinture et la Route » entre la Chine-Afrique : enjeux et défis des dynamiques transitionnelles », Revue d’Études Sino-Africaines (RÉSA), Vol. 2, No. 1, pp. 81-93
Mudimbe, V.-Y. (1988) The Invention of Africa: Gnosis, Philosophy, and the Order of Knowledge (African Systems of Thought), Indiana University Press,
Ndjounguep, J. (2019) « La cartographie participative, un outil au service de la gouvernance foncière », African Journal on Land Policy and Geospatial Sciences, 2 (3), 52-72.
Ostrom, E. (2015). Governing the Commons: The Evolution of Institutions for CollectiveAction. Cambridge University Press
Santos, B. de S. (2014). Epistemologies of the South: Justice Against Epistemicide. 1st Edition, Routledge, 284p.
Zoyem & Mbih (2021). « Risk Assessment of Chemical Pollution of Industrial Effluents from a Soap Production Plant », Nature Environment and Pollution Technology, Vol. 21, No. 3, pp. 931-940.